Tuesday, March 7, 2017

Nabyla Maan « Ma musique métissée traverse les frontières »

Nabyla

Férue des musiques arabo-andalouses, Nabyla Maan revisite à nouveau un classique du Tarab Andaloussi. Tirée de son dernier album « Dalalu Al Andalus », « Chams Al-Achia » aux tons jazzy nous transporte dans un univers moderne qui ne trahit en rien ni le sens des paroles ni l’esprit de l’œuvre d’origine.

D’où est née l’idée d’une nouvelle version de Cham’s Al Achia ? L’idée s’inscrit dans mon projet de redécouverte des musiques anciennes marocaines, que j’ai entamé depuis 2014. Ce projet qui a aboutit à un album qui sort dans les semaines qui viennent. Le premier opus qui est « Laghzal Fatma » est sorti fin 2014 et Chams Al-Achia en est la suite.

Pourquoi une touche jazzy ? Le jazz a toujours été pour moi un symbole d’ouverture car c’est un style de musique qui a conquis le monde entier. En plus, j’aime beaucoup l’harmonie du Jazz surtout quand on l’ajoute à une musique à caractère modale et monodique comme les musiques anciennes marocaines. Tout cela inscrit la musique que je fais dans la world musique, une musique métisse qui traverse les frontières.

D’où vous vient cette passion pour les musiques arabo-andalouses ? A côté d’autres musiques, j’ai été bercée par Tarab Andaloussi et Malhoune. Ce sont des musiques que m’ont fait découvrir mes parents. Et même si j’ai débuté ma carrière en empruntant une autre direction artistique, ces musiques sont toujours restées graver en moi.

Ça vous a pris 3 ans de recherche pour concrétiser votre dernier album « Dalalu Al Andalus ». Comment le définissez-vous ? C’est l’album qui m’a pris le plus d’efforts en matière de recherche. Il y a des gens qui croient que faire des reprises est plus facile que de composer. Ayant fait les deux, je trouve que c’est aussi difficile. Refaire une musique qui a déjà fait ses preuves est une responsabilité où je dois veiller sur chaque détail afin de respecter l’esprit de l’œuvre d’origine et de ne pas le dénaturer. Ce qui différencie cet album, c’est qu’il est constitué uniquement de reprises de Tarab Andalussi, Malhoune et Tarab Gharnati. Stylistiquement parlant, la sonorité de Jazz est très présente à travers l’harmonie et le jeu de piano et de la basse.

Une autre collaboration avec Mohamed Briouel, pourquoi ? M. Briouel est mon maître, c’est avec lui que j’ai fait mes premières scènes. C’est « un trésor national vivant ». Il m’éclaire sur mes choix artistiques en musique andalouse et autres musiques traditionnelles. Je fais toujours des concerts avec lui en mode traditionnel, ce qui me permet de me nourrir de cet art qui a traversé des siècles tout en gardant une très grande estime.

Et le choix de Nor Eddine Bahha ? Nor est un spécialiste du Jazz. Et il a aussi une grande connaissance en musiques traditionnelles marocaines et une intelligence musicale très rare. Il est auteur de « Jazzollogy », un ouvrage sur la théorie de l’harmonie du Jazz édité au États-Unis. Les gens qui le connaissent savent que c’est un musicien accompli ayant une ouverture sans frontières sur les cultures musicales mondiales.

Le jazz a toujours été pour moi un symbole d’ouverture.

A 19 ans, vous avez été la plus jeune arabe et africaine à chanter à l’Olympia à Paris. Quel effet ça vous a fait à l’époque et quel souvenir en gardez-vous ? Chanter à l’Olympia à 19 ans est une chance qui ne se présente pas à tout le monde. C’est un très beau souvenir qui m’avait beaucoup motivé à l’époque.

Vous avez fait des reprises de Nass Ghiwane avec un zest Techno. Vous avez inventé de nouvelles sonorités tout en puisant dans le patrimoine musical du pays. Le fait de moderniser les musiques traditionnelles, est-ce une chose qui vous tient à cœur ? A la base je suis auteure, compositrice et interprète mais ma passion pour les musiques marocaines ne me laisse jamais indifférente. En fait, j’estime que redécouvrir le patrimoine traditionnel et sa réouverture sur les musiques du monde reste un élément très enrichissant.

Vous pensez que les jeunes s’intéressent moins aux musiques traditionnelles ? Comme dans tous les pays, les musiques traditionnelles sont moins suivies que les musiques modernes.

Vous avez fait des duos avec Omar Sayed, Said Moskir, Khaled… Quels souvenirs en gardez-vous ? J’en garde de très bons souvenirs, je n’en remercierai jamais assez M Omar Sayed pour son parrainage. Mon duo avec Said Moskir a marqué les radios nationales pendant une très bonne période. Quant à Khaled c’était lors d’un concert et c’était un immense plaisir de partager la scène avec ce grand Monsieur.

Avec qui rêvez-vous de faire un duo ? Je n’ai pas d’idée précise mais j’aime collaborer avec des artistes qui inspirent l’ouverture.

Vous êtes aussi compositrice. Qu’est ce qui vous inspire? J’écoute souvent de nouvelles musiques, je voyage, je rencontre de nouveaux musiciens, tout cela m’inspire. Pour composer, ce n’est pas seulement une question de muse, mais une question de travail et d’ouverture aussi.

Une de vos passions est la lecture, quels genres de livres aimez-vous lire ? J’aime les romans en particulier ainsi que les livres sur la médecine.

Votre mari Tarik Hilal est aussi votre manager. Est-ce que c’est facile de vivre et de travailler en même temps avec l’homme de sa vie ? C’est magnifique de vivre de sa passion et c’est encore mieux quand on partage notre vie avec une personne qui a la même passion que nous. Notre musique est une continuité de nos personnes. C’est un peu difficile à expliquer mais c’est ça !

L’arrivée d’un bébé, est ce que ça a changé votre vie  et comment ? Oui, c’est un bonheur particulier à travers lequel de nouveaux objectifs s’ajoutent à la vie.

Est-ce que vous vivez de votre art ? Oui bien sûr, mon mari et moi ne travaillons que dans la musique.

Que pensez-vous de la situation de l’artiste et du chanteur au Maroc ? Pour réussir une carrière, il faut beaucoup de travail et une vision homogène de ce qu’on fait. Au Maroc, le secteur de la musique est en évolution mais il reste quelques questions très importantes à régler comme celles du droit d’auteur qui constitue l’épine dorsale de la rémunération des auteurs et compositeurs.

Si vous n’étiez pas chanteuse, compositrice, vous serez quoi ? Avocate comme mes parents ou dans un autre métier de l’art.

Qui est Nabyla Maan que personne ne connait ? Une petite fille gourmande et turbulente.



via Abdo El Rhazi Nabyla Maan « Ma musique métissée traverse les frontières »

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