Par Ahmed Charaï
L’approche de Jared Kushner pour la paix au Proche-orient est novatrice. Il tire un constat indiscutable. Le processus politique, initié à Madrid puis à Oslo est en panne depuis plus de dix ans. Résultat : le conflit s’est exacerbé, les positions se sont radicalisées et la possibilité d’un accord est une chimère.
Dire qu’il faut commencer par améliorer la vie des populations de la région, par créer de l’espoir chez la jeunesse palestinienne, mais aussi jordanienne et égyptienne, avant de discuter territoires, n’est pas dénué de sens.
La conférence de Bahrein, malgré l’absence de l’autorité palestinienne et les positions de certains pays arabes, a réussi à soutirer des engagements de financement et une vision du renforcement des infrastructures pour permettre l’éclosion d’économies viables.
La mise en marche de ce projet doit prendre sa vitesse de croisière. La situation sur le terrain est certes conflictuelle, mais les aspirations de la jeunesse sont un atout qui devrait accélérer ce processus.
Le plan Kushner est présenté dans un contexte assez explosif.
Le monde ne suit que le conflit avec l’Iran. Pourtant, des tendances profondes s’opèrent d’abord en Israël.
Netanyahu pouvait s’enorgueillir, du point de vue israélien, d’un beau bilan. Il a réussi à faire reconnaître par les USA et d’autres pays, Jérusalem comme capitale, à annexer le Golan et même l’extension des colonies. L’économie israélienne fonctionne à merveille. Tous les voyants sont au vert. Et pourtant la jeunesse israélienne a voté massivement contre lui. Pourquoi? Le style Nétanyahou est jugé trop clivant, trop agressif, trop nationaliste . Les jeunes israéliens l’expriment dans tous les sondages, ils aspirent à une société plus apaisée en interne et à des relations normales voir de vivre ensemble avec leur environnement, les Palestiniens en premier.
L’autre phénomène c’est quand même le vote des Arabes israéliens. La liste unifiée est arrivée en troisième position avec 13 sièges. Lieberman n’en a que huit et se présente comme le faiseur de rois. C’est d’une importance politique capitale. Les Arabes israéliens lancent un défi à l’État hébreu, ils veulent intégrer mais pas en tant que citoyens de seconde zone.
Les Arabes représentent environ 20% de la population israélienne mais, historiquement, leur participation aux élections nationales a pris beaucoup de retard par rapport à celle des Juifs. Ce n’est pas que les Arabes ne croient pas au vote. Ils ont tendance à être beaucoup plus nombreux que les Juifs aux élections locales, ce qui affecte leurs propres villes: Aux élections municipales de 2018, le taux de participation arabe était de 84,4%, contre 54,8% pour les Juifs.
Cette frange de la population est importante pour la paix, car elle constitue un pont entre les Arabes et les arabes palestiniens d’un côté et les citoyens israéliens de l’autre.
Le plan de paix de Jared Kushner gagnera en profondeur s’il prend en considération cette donne stratégique.
Le contexte américain
Le contexte américain est tendu en ce moment. Le Président américain, connu pour son style non- conventionnel, a pris plusieurs décisions, qui sont importantes pour ses fidèles , parfois décisives.
Mais son style qui ne respecte pas les codes de l’establishment, dérange. L’affrontement en ce moment entre Républicains et Démocrates a atteint ses limites par une demande de “ l’impeachment “ du Président .
Mais en tant que méditerranéen, ami des USA, et contrairement à une idée reçue, je pense que ce qui se passe aux USA, renforce l’image de l’Amérique, celle d’un pays où les institutions fonctionnent, les contre-pouvoirs existent, une vraie démocratie. Plus que la puissance militaire, c’est cette image qui donne aux États-Unis un rôle de premier plan dans les relations internationales.
Croire que les tensions actuelles diminuent l’influence US est une erreur. Les USA restent la seule puissance qui pourra imposer un plan de paix au proche-Orient et particulièrement entre Israéliens et Palestiniens.
Et c’est pour cela que Jared Kushner doit installer son plan dans la durée.
Son approche mérite d’être testée, évaluée.
Pour ce faire, il faut qu’il réussisse d’abord la première étape de son Plan, c’est-à-dire le volet économique : que les populations bénéficient de routes, d’hôpitaux, de l’emploi, autrement dit d’une certaine prospérité, facilitera l’accord politique, nécessairement conflictuel, et plus long à obtenir.
Dans les contextes difficiles, mouvants, la prudence dans la continuité est une qualité.
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via Abdo El Rhazi Le plan Kushner peut-être un tournant Si et seulement Si…
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