Par : Ahmed Charaï
Le séisme politique en Tunisie où la classe politique traditionnelle a été balayée au profit de deux candidats antisystème, surtout antinomiques, n’est pas un cas unique.
Partout, la tendance est à la remise en cause des formations politiques classiques. Netanyahu se targuait d’un excellent bilan économique, mais aussi d’un soutien américain sans faille avec la reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l’État sioniste, l’annexion du Golan, les colonies en Cisjordanie. Cela n’a pas empêché sa défaite à cause de deux phénomènes. Le premier, c’est que les Arabes israéliens qui représentent 20% de l’électorat n’ont pas boycotté mais ont créé une liste unique censée leur permettre de peser sur la politique du prochain gouvernement. Le second, et c’est le plus important, c’est que la jeunesse israélienne cherche une société plus apaisée et trouve que les gesticulations clivantes de Bibi ne passent plus.
Ce divorce entre les jeunes, les classes populaires et les élites politiques est une vraie tendance universelle, qui ne fait que se renforcer au fil des élections. La politique à l’ancienne ne fait plus recette. La mondialisation, l’internet, la tendance à l’individualisme y sont pour beaucoup. Mais cette lame de fond pose des questions profondes que l’establishment ne comprend même pas.
Au Maroc, nous sommes dans l’expectative. Lors des dernières élections, seuls 37% des inscrits ont voté, alors que des millions de citoyens en âge de voter ne sont même pas inscrits. Ce taux était en hausse parce qu’il y avait un vrai clivage politique entre ceux qui voulaient barrer la route aux islamistes et ceux qui étaient contre le «présumé Tahakkoum», la volonté de maitriser la carte électorale. Les deux partis qui représentaient ces deux tendances ont dépassé les 100 sièges chacun, ce qui était une première au Maroc. Ce clivage a fait pschitt, c’est une réalité.
Le Parti authenticité et modernité (PAM), une excellente idée de renouvellement au départ, s’est totalement englué dans des luttes intestines, non pas autour de divergences politiques, mais sur des rapports de clans. Depuis des mois, il ne communique que sur sa crise et non pas sur les sujets qui agitent l’opinion publique.
Le PJD n’est pas en meilleure forme. L’hypothèque Benkirane est toujours là et la question de l’enseignement l’a prouvé. Mais en plus, le parti doit gérer les contradictions entre le discours rigoriste et le comportement humain, simplement humain, de ses membres. La question de la défense des libertés individuelles lui est posée et elle est explosive.
L’USFP, de son côté, est saisi par l’instinct de survie. Il s’engage dans un processus de réconciliation et d’ouverture. Mais s’il n’arrive pas à redéfinir un projet pour la période à venir, cela ne servirait à rien.
La classe politique, dans son ensemble, est collée à de vieux paradigmes. Elle est devenue autiste parce qu’elle vit en vase clos. La jeunesse réclame du travail, une ouverture libertaire, une offre culturelle plus grande et n’a cure des discours politiciens. Si les choses restent en l’état, c’est le taux d’abstention qui tranchera, où l’apparition d’un leader charismatique populiste qui emportera tout sur son passage. Dans les deux cas le Maroc sera perdant.
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via Abdo El Rhazi Une lame de fond universelle
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