On ne va pas se raconter des histoires. À sa naissance officielle en 1978, le Rassemblement National des Indépendants (RNI) d’Ahmed Osman, alors premier ministre et connu pour être très proche de Hassan II, est un parti, comme on les appelait à l’époque, de l’administration. Longtemps il va porter cet ADN comme une marque avilissante, notamment aux yeux des partis historiques, essentiellement l’Istiqlal et l’USFP, qui revendiquaient de façon prétentieuse et péremptoire l’exclusivité de la représentation des masses populaires, comme s’il s’agissait d’un bloc monolithique. Mais très tôt, le RNI voit son aile paysanne le quitter pour former le PND et en 1981 il est renvoyé par Hassan II sur les bancs de l’opposition se faire une santé de vrai parti.
Deux ans plus tard, un autre premier ministre en poste, Maati Bouabid, lance un nouveau parti, l’Union Constitutionnelle qui lui dispute la représentation de cette autre partie du Maroc, force diffuse, mais néanmoins puissante et réelle, qui ne se reconnait pas dans les partis politiques dits historiques. Tous ces évènements, les mauvaises relations d’Ahmed Osman avec le tout puissant ministre de l’intérieur, Driss Basri, aidant, au lieu de fragiliser le RNI, lui confèrent une certaine crédibilité et le rendent fréquentable. Pour faire court, c’est ainsi que l’USFP de Abderrahmane Youssoufi, aux bases réticentes qui vouaient aux gémonies ce parti, n’aura aucune difficulté en 1998 à s’allier au Rassemblement et à en faire même son principal partenaire au sein de la majorité gouvernementale au détriment de son allié traditionnel, l’Istiqlal.
En 2007, la décision d’Ahmed Osman de ne consacrer désormais ses jours qu’à ses affaires et ses weekends au bridge, fait entrer le RNI dans une phase d’instabilité qui a aiguisé les appétits et réveillé les rivalités. L’émergence du Parti Authenticité et Modernité, si elle ne l’a pas entièrement frappé de caducité, a énormément réduit sa marge de manoeuvre. En y ajoutant la présidence de Salaheddine Mezouar, qui n’est pas des plus dynamiques, on comprend aisément les résultats des législatives du 7 octobre 2016 : 37 sièges et une malheureuse quatrième place sur huit. Le réveil est dur, mais prend la forme d’une question existentielle.
Quelle place encore et quel avenir pour le RNI au Maroc ? C’est l’équation que doit résoudre le congrès de ce parti programmé par son nouveau président, Aziz Akhennouch, pour mai prochain. Un début de réponse existe. L’élection du président de la Chambre des représentants l’a clairement montré. Sans compter l’Istiqlal qui n’est dans le giron du PJD que par dépit et n’est pas condamné à le rester, la majorité n’est pas du côté des islamistes. Le modèle tunisien n’est certainement pas universel et n’est pas forcément applicable au Maroc, mais il a démontré que le regroupement de tous ceux qui ne se reconnaissent pas dans l’islamisme, au sein d’un large front, a mis en minorité le parti Annahda de Ghannouchi. Or ce qui a fait aux législatives le bonheur de Benkirane et de ses amis, c’est la dispersion de ses adversaires, société civile comprise. Probablement parce que, entre autres ingrédients qui nourrissent cet émiettement, on attend qu’émerge un homme ou une femme rassembleur qui en ait envie, qui a l’énergie nécessaire et qui ne soit pas clivant. Ce n’est peut-être qu’une vue de l’esprit, mais susceptible d’ouvrir une voie, d’indiquer une piste.
via Abdo El Rhazi Libre cours
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