Pour cette 18eme édition du Festival du Film de Marrakech, nous vous présenterons tous les films qui sont en compétitions pour décrocher l’Etoile d’Or, précieux sésame du FIFM.
Deuxième film de cette journée du samedi 1er décembre 2018, « Joy », long métrage de la réalisatrice Sudabeh Mortezai.
Il ne faut pas se leurrer, le titre du film n’a aucun rapport avec l’histoire qu’il relate. « Joy » soit « Joie » n’est pas le thème du long métrage, mais plutôt le prénom de celle que l’on suivra tout au long de l’histoire.
Première séquence, premier choc. Nous sommes au Nigeria, une jeune fille se prépare pour immigrer en Europe, mais avant ça, elle doit accomplir une sorte de rituel durant lequel elle s’engage à « rembourser sa dette ».
La cérémonie très glauque est dirigée par un gourou, qui commence par plumer la tête d’un coq vivant, avant de l’égorger et recueillir son sang. Il le mélange à diffèrent ingrédients puis le présente à la jeune fille pour qu’elle l’ingurgite… Et ce ne sont que des détails. La séquence est saisissante par le contraste qu’elle propose, à savoir une cruauté inouïe, qui s’oppose à l’impassibilité déconcertante des deux protagonistes.
Et ce n’est que le début.
Le spectateur comprend ensuite le destin de cette jeune fille qui répond au prénom de Precious, c’est celui de milliers d’autres jeunes filles, qui font l’objet d’esclavage sexuel.
Telle des marchandises, elles sont transportées en Europe, à Vienne dans le film contre la somme de 60 000 euros. Elles doivent vendre quotidiennement leurs corps pour rembourser cette somme à la « Madame ». Comprenez la maquerelle qui a payé pour que ces filles soient « importées ».
Elles doivent dans ce sens payer 1000 euros par mois à la maquerelle. Gare à celle qui ne paye pas cette dette mensuelle.
Precious le comprendra à ses dépens, dans l’une des séquences les plus intenables du film. Lorsque la « Madame » donne l’ordre à ses hommes de garde, de violer la jeune fille de 18 ans.
La « Madame » arrive dans l’appartement ou vivent les prostituée, c’est le jour de la collecte. Toutes les filles payent leurs dues, à part Precious, qui vient à peine de commencer son premier mois. Le verdict est sans appel, les hommes de garde emmènent la jeune fille dans la chambre à côté, et la viole à tour de rôle.
La scène est particulièrement insoutenable. Sans que la réalisatrice ne montre la scène complète du viol, on voit l’un homme de garde tenir les bras de la jeune victime, on entend ses cris et on lit toute la peine et la souffrance du monde, sur les visages des autres prostituées, qui révoltées, ne peuvent cependant rien faire.
L’histoire de Joy pour sa part, est celle d’une prostituée qui a presque fini de rembourser sa dette et qui doit s’occuper de Precious pour qu’elle s’intègre dans ce nouveau monde, celui de la prostitution, de la superstition, du racisme et du danger de mort imminent.
Elle se retrouve malgré elle complice de ce cercle vicieux du trafic sexuel, car même si elle paye sa dette, elle ne dispose ni de visa, ni de permis de travail, la seule issue qu’elle aura, c’est de devenir elle-même maquerelle, sous peine de retourner au Nigeria.
A travers ce film, la réalisatrice a réussi à offrir au public un portrait de la résistance humaine face à ce système d’exploitation impitoyable dans un environnement des plus inhumains sur le sol européen.
Née à Ludwigsburg en Allemagne et ayant grandi à Téhéran et à Vienne, Sudabeh Mortezai a obtenu une maîtrise en études de théâtre et de cinéma de l’Université de Vienne en 1994.
Ce film difficilement soutenable, est un chef d’œuvre de la souffrance humaine et s’attaque à un sujet d’actualité.
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via Abdo El Rhazi FIFM 2018 – Compétition officielle (2/14): “Joy”, l’immigration clandestine dans toute sa cruauté
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