Flambée des coûts du fret maritime depuis la Chine, impact sur les importations du thé, risque de rupture sur la marché, révision à la hausse des prix du thé sur le marché local…précisions du président de l’association Marocaine des industriels du thé et du café, Mohamed Astaib.
L’Observateur.info : Quel regard portez-vous sur l’augmentation du fret maritime depuis la chine surtout que le marché local dépend fortement des importations du thé en provenance de ce pays?
Mohamed Astaib : Au même titre que tous les pays du monde, le Maroc se trouve en face d’une tendance haussière inégalée du fret maritime depuis les mois de Novembre et Décembre 2020 et cette tendance ne cessera pas d’évoluer dans ce sens en affichant sur ce marché des hausses record. Selon les données prévisionnelles qui nous sont communiquées par les chargeurs, il faudrait s’attendre à un trend haussier progressif au fil des jours. Le tarif du fret enregistré au courant du mois de Janvier a déjà atteint la barre des 9000 dollars US pour un conteneur d’une capacité de 40 pieds et les armateurs prévoient des tarifs seuils de 11.000 dollars US environ au mois de février de cette année pour la même capacité. Cela revient à dire que le niveau du tarif actuel du fret a presque triplé par rapport à la tarification appliquée avant la crise pandémique du Covid-19. Il s’agit donc d’une situation intenable pour tous importateurs marocains, toutes activités sectorielles confondues, dont l’activité a déjà été impactée, considérablement, par cette pandémie.
Quelles sont les causes réelles de cette hausse des coûts du fret ?
Cette augmentation des tarifs de transport maritime vient à un moment où les institutions financières internationales et l’Organisation Mondiale de Commerce (OMD) prédisaient des lueurs d’espoir d’une reprise des échanges commerciaux internationaux, post pandémie. D’après certaines sources spécialisées dans le domaine du transport maritime international, la cause principale est la l’impossibilité, pour les armateurs, de faire face à la forte demande internationale exprimée, simultanément, par tous les pays dans cette période de démarrage des échanges des flux commerciaux et ce, par manque manifeste de conteneurs. C’est donc à cause de cette inadéquation du volume des conteneurs par rapport aux sollicitations des demandeurs que le principe de l’adéquation de l’offre à la demande aurait prévalu dans la fixation de cette nouvelle grille de tarification du fret. A cela s’ajouterai d’autres aspects techniques notamment les problèmes de disponibilité de places sur de nombreux navires affichant complets et les insuffisances d’équipements pour le traitement des conteneurs doublées de difficultés de gestion des flux au niveau des terminaux à conteneurs.
« Nous allons essayer d’amoindrir les retombées des surcoûts découlant de la hausse des tarifs du fret sur la formation de nos prix de vente de thé »
Quel sera l’impact de cette hausse des tarifs du fret sur les importations du thé et sur le secteur en général ?
La flambée de cette nouvelle tarification du fret engendrera, forcément, une augmentation de l’assiette imposable au niveau de nos déclarations en douane et, par la même, un surplus au plan de la fiscalité douanière. La conséquence logique d’une telle situation pénalisante est le renchérissement des prix sur le marché intérieur et le pouvoir d’achat du consommateur final sera directement touché par ces augmentations impromptues. Au-delà de cet aspect, l’augmentation du tarif du fret est de nature à faire réévaluer, à la hausse, les prix transferts relatifs au transport maritime des marchandises importées ce qui aura, directement, des répercussions négatives sur notre balance des paiements déjà fragilisée durant cette crise pandémique. A signaler, à titre complément, que ce retournement de situation imprévisible dans l’instauration de cette nouvelle tarification du fret maritime qui a échappé aux analystes et experts en le domaine, impactera tout l’écosystème de notre commerce extérieur, y compris, également, la compétitivité de nos entreprises d’exportation. En tant qu’importateurs de thé de Chine, il est indéniable que cette augmentation substantielle du fret impactera, doublement, notre prix de revient dans la mesure où nous le différentiel de l’augmentation du fret sur nos cargaisons aux armateurs considérés et régler à la douane un supplément fiscal du fait que cette augmentation des frais de transport entre dans les éléments constitutifs de la valeur en douane sur la base de laquelle les droits et taxes à l’importation sont déterminés.
Y aura-t-il des augmentations des prix de vente du thé sur le marché local?
Le thé constitue une denrée alimentaire incontournable par nos concitoyens et constitue, de ce fait, un produit obéissant à des impératifs régissant les produits dits « stratégiques » soumis à des obligations du secteur de disposer de « stocks de sécurité » en vue d’éviter toute rupture de ce produit sur le marché intérieur. Ainsi, la plupart des importateurs de thé disposent, actuellement, de stocks suffisants de thé pour faire face à la demande intérieure, importés dans les conditions favorables qui prévalaient à l’époque avant cette flambée brutale des frais de transport. Cependant, si cette situation haussière du tarif du fret maritime perdure dans le temps, le secteur demeurera soumis à une double contrainte, à savoir celle de continuer, impérativement, à assurer l’approvisionnement du marché intérieur en cette denrée alimentaire stratégique, quelque soient les conséquences sur son prix de revient à l’arrivée et celle d’essayer, autant que possible, d’amoindrir les retombées des surcoûts découlant de ce nouveau contexte sur la formation de nos prix de vente .
Avec tous ces problèmes d’importation du thé de la Chine, ne serait-il pas le moment de se lancer dans une culture de thé au niveau local ?
Cette question est effectivement pertinente dans la mesure où elle s’inscrit, d’une part, dans le cadre de la « sécurité alimentaire » que les pouvoirs publics se doivent d’assurer pour ses concitoyens et d’autre part, dans la politique de l’Etat de réduire le volume des importations, favoriser les productions nationales et ainsi alléger notre balance des paiements et réduire notre dépendance des marchés extérieurs.
Le Maroc a déjà mis en application l’alternative, dans les années 1980, de cultiver le thé, à titre d’essais, dans la région de Larache mais cette expérience n’a pas été menée jusqu’à son aboutissement final pour des considérations de maitrise du « know how » approprié, semble t-il. Cependant, cette expérience serait, peut être appelée à se renouveler mais dans le cadre d’une joint venture avec la Chine pour une meilleure maitrise de ce secteur agricole dans lequel ce pays dispose d’un savoir séculaire. Donc, cette hypothèse demeure toujours, à mon avis, envisageable mais peut être à long terme et, certainement pas, dans l’immédiat.
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via Abdo El Rhazi Le prix du thé va t-il augmenter?
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