Comme toujours, le vrai débat est encore une fois occulté. La campagne de boycott aurait pu déboucher sur un débat sur la vérité des prix et pousser chaque entreprise à mieux expliquer la formation de sa valeur ajoutée et de ses bénéfices nets.
Nous n’avons pas eu ça pour la raison simple que les boycotteurs ne semblent pas poursuivre cet objectif. Ils se permettent d’insulter les non boycotteurs, devenus des traîtres.
Nous n’avons pas eu ça parce que les opérateurs économiques, au lieu de produire un message apaisant et cohérent répondent, eux aussi, par des insultes, les traîtres sont les boycotteurs.
Le gouvernement, en tant qu’émanation des citoyens et de tous les acteurs économiques et sociaux, aurait du dans ce cas, tenir un rôle d’arbitre. Il ne l’a pas tenu, puisque le ministre de l’Economie et des finances s’est lui aussi laissé emporter, qualifiant les boycotteurs d’étourdis, ou de fous, peu importe la traduction qu’on donne au terme qu’il a utilisé en darija.
Le boycott, dont personne ne connaît jusqu’à maintenant le ou les instigateurs, est fondé sur une très faible connaissance en matière économique à laquelle s’ajoute le mensonge et la manipulation. Les chiffres volent à gauche et à droite, et les suiveurs n’ont pas le reflexe de les vérifier. Ils croient ce qu’on leur présente sur facebook comme une vérité absolue.
C’est le cas par exemple d’une publication qui prétend que l’action d’Afriquia gaz a chuté à cause du boycott. Elle serait tombée au niveau de 2300 dirhams. Une simple vérification, sur le site de la bourse de Casablanca, accessible à tout le monde, permet de voir l’évolution de l’action sur une longue période. Le cours n’a pas été en deçà de 2700 DH et au moment du boycott, il était à 3.300 DH, cours maintenu jusqu’au 25 avril. C’est donc très facile de tromper l’opinion publique avec quelques tableaux trafiqués.
En plus, et c’est là où l’ignorance est la plus flagrante, Afriquia Gaz n’est pas distributeur de carburant.
On peut imaginer facilement quel regard portent les boycotteurs sur ceux qu’ils manipulent. Ils les considèrent comme des gens incapables de vérifier quoi que ce soit, qu’ils croient n’importe quoi et qui sont donc facilement manipulables. C’est là où les entreprises pourraient gagner des points en s’adressant non pas à des incultes, faciles à mener, mais à des acteurs intelligents. Cette recommandation vaut aussi pour le gouvernement dont les membres sont en majorité élus par le peuple.
Quoi qu’il en soit, au final, nous aurons manqué une belle occasion de discuter sur des sujets vraiment intéressants. Comment fonctionne l’économie marocaine ? Qui en bénéficie le plus ? Sommes-nous mûrs pour une économie ouverte et internationalisée… Comment fonctionne la société marocaine ? Pour cela nus avons d’intellectuels impartiaux qui garderaient la même distance vis-à-vis de tous les protagonistes. Pour le moment, au lieu d’analyses crédibles, le terrain est laissé tout entier aux populistes.
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via Abdo El Rhazi Nous avons raté un bon débat
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