Avec le sourire aux lèvres et beaucoup de notes sur son calepin, le président de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD) a rencontré, mardi 4 février, des représentants de médias nationaux dont lobservateur.info au siège de cette Commission à Rabat.
Accompagné de Hakima Himmich, Ahmed Reda Chami, Mohamed Tozy et Driss Ksikes, il a présenté l’état d’avancement de la co-construction de ce qu’il a appelé « un cadre référentiel qui peut servir de base à un nouveau pacte social ».
Durant près de trois heures, le président et les quatre membres de la Commission se sont relayés pour détailler ce qui a été fait, ce qu’il en est sorti jusqu’à présent et ce qu’ils comptent faire d’ici fin juin prochain. Date à laquelle, il devront rendre leur rapport.
A moins de cinq mois de la fin de ce délai, qui reste inchangé comme l’a précisé Benmoussa, et après 50 jours de travail, plus de 40 réunions ont été tenues au niveau central. S’y ajoutent des rencontres de terrain dans le monde rural dans la province de Taroudant, à Taliouine, El Jadida, Ifrane et Azrou. D’autres rencontres suivront.
La première se tient aujourd’hui au siège de la Haca avec des représentants des médias. D’autres rencontres, dites labellisées, suivront et seront tenues en réponses à des demandes d’ONG, selon un cahier de charges préétabli pour optimiser la gestion du temps et la recherche de résultats pratiques. Les lieux, les régions et les localité changeront, mais le dénominateur commun des réunions de la CSMD est qu’elles échappent à la « propension populiste » et qu’elles se tiennent en l’absence des autorités locales, comme l’a rappelé Mohamed Tozy.
« Le but est à la fois d’écouter les citoyens et de recueillir les solutions possibles qu’ils proposent », a souligné le président de la CSMD.
Tozy a rappelé que leur but des rencontres est de permettre aux membres de la commission d’aller au-delà des éléments du diagnostic disponibles à travers les différents rapports déjà produits par différents organismes et institutions nationales et internationales. « Nous allons à la rencontre de citoyens pour ne pas nous tromper de diagnostic », a déclaré Driss Ksikes.
« C’est un exercice pratique pour le contact avec le terrain, pour une connaissance encore plus approfondie des réalités, et surtout pour confronter la perception à la réalité du terrain », a poursuivi Tozy, en insistant sur les bienfaits de l’intelligence collective. De cet exercice, qui n’est pas nouveau pour le chercheur universitaire qu’il est, Mohamed Tozy a affirmé avoir relevé ce grand paradoxe : « Même si le vécu de certains citoyens rencontrés est pénible, leurs demandes sont raisonnables : un dispensaire, une école… ». Il a noté également que les gens ont des doléances, mais ils les présentent et ne restent pas les bras croisés en attendant les réponses. Tozy a donné cet exemple parlant d’un douar reculé où les habitants se cotisent pour payer 1000 dirhams à un médecin privé qui vient assurer des consultations deux fois par semaine, faute de médecin du public dans leur localité. D’autres douars trouvent d’autres solutions pour d’autres problèmes locaux et c’est ce qui amène la commission à souligner l’idée d’institutionnaliser certaines de ces solutions.
Co-construction et confiance
Ahmed Reda Chami a souligné l’importance de la participation comme élément essentiel pour l’appropriation des futures propositions. Avec son franc parler habituel, il a rappelé que ce travail de réflexion pilotée par la CSMD est la responsabilité de tous les Marocains et pas seulement des membres de cette commission. En soulignant que le processus enclenché vise l’élaboration d’un cadre de référence pour un modèle de développement et non un modèle de croissance, Chami a beaucoup insisté sur la nécessité du rétablissement de la confiance. Il a aussi énuméré les grands défis qui restent à relever dans la lutte contre la corruption, contre l’économie de rente et contre la concurrence déloyale, entre autres.
Hakima Himmich a, quant à elle, rapporté certaines des principales doléances des jeunes. Ces derniers ne font pas confiance aux politiques, dénoncent l’état catastrophiques de certaines universités publiques, revendiquent le respect de leurs libertés individuelles, se plaignent du problème des langues étrangères qu’ils ne maîtrisent pas, s’insurgent contre les inégalités… « Certains membres de la Commission ont pleuré », confie Himmich en rapportant que certains jeunes ont déploré leur incapacité d’avoir un rêve autre que celui de quitter le pays. « Nous sommes en situation d’urgence », a-t-elle conclu.
Abondant dans le même sens, Driss Ksikes insiste lui aussi sur l’urgence de la situation en mettant en exergue le caractère systémique de la corruption, la rente et conflits d’intérêts. Pour lui, la clarification des règles du jeu s’impose. Ksikes note aussi que le manque de confiance s’amplifie non seulement envers les institutions, mais aussi entre les individus. Insistant sur la co-construction, en tenant compte des perceptions qui font partie de la réalité, il affirme que la Commission ne va pas prescrire un modèle de développement mais va juste le révéler.
Entre pragmatisme et optimisme
Prenant en considération les remarques exprimées à l’encontre des partis politiques, Benmoussa a relevé des rencontres tenues par la Commission avec certaines de ces formations que ces dernières ont elles aussi mené un travail de réflexion sur le modèle de développement et qu’elles ont conscience des problèmes. Il a aussi insisté, comme l’a fait Chami, sur leur rôle vital dans le pays. On le sait, il ne peut y avoir de démocratie sans partis politiques. Respectant le rôle de tous les acteurs institutionnels du pays, la CSMD a bien conscience que ses propositions doivent dépasser le temps politique. C’est pour cela que pour la mise en pratique de ses recommandations, l’horizon visé est de la prochaine décennie. « Mais avec une combinaison entre le cadre de référence et la réponse à des urgences », a tenu à souligner Mohamed Benmoussa. Comme les autres membres de la commission, son président estime qu’il y a des raisons d’être optimiste. Il promet un rapport pas comme les autres, puisque devant comporter des mesures pratiques avec proposition de mode d’application. « Nous sommes dans le temps des solutions », synthétise Chami.
Les rencontres vont se poursuivre dans différentes régions et localités, des panels d’experts sont aussi prévus, les MRE seront aussi sollicités pour faire partie de cette intelligence collective. Ce n’est pas tout, une plateforme interactive est annoncée pour la semaine prochaine pour dématérialiser la participation à cet effort de co-construction.
Accroches :
. le dénominateur commun des réunions de la CSMD est qu’elles échappent à la « propension populiste » et qu’elles se tiennent en l’absence des autorités locales
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via Abdo El Rhazi Commission spéciale sur le modèle de développement : Le temps des solutions
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