Par Ahmed Charaï et Boaz Bismuth*
L’histoire s’écrit à nouveau alors que le premier vol direct depuis Tel Aviv atterrit mardi à Rabat, la capitale du Maroc. Ce vol est le premier signe visible de la nouvelle relation entre le Maroc et Israël, ouvrant une nouvelle ère de reconnaissance diplomatique.
Le Maroc est désormais le quatrième pays arabe à conclure de nouveaux accords diplomatiques avec Israël en autant de mois. Les Émirats arabes unis ont courageusement ouvert la voie, malgré les menaces de l’Iran et de ses mandataires, en signant un accord de paix avec Israël en septembre 2020, ce qui en fait le premier pays arabe à le faire depuis la Jordanie en 1994. Les Émirats ont été aussitôt suivis par le Bahreïn, le Soudan, et maintenant le Maroc.
La paix entre le Maroc et Israël puise ses racines dans des siècles d’Histoire. Le défunt Roi du Maroc, Hassan II, a travaillé sans relâche pour promouvoir le rapprochement entre Israël et ses voisins arabes. Il a facilité toutes les grandes initiatives de paix, de Camp David dans les années 1970 aux accords d’Oslo dans les années 1990. Dans les coulisses, le Roi Hassan II a joué un rôle moteur pour faire de l’Égypte la première nation arabe à signer un traité de paix avec l’État juif. Le Roi Mohammed VI maintient le même engagement à faire progresser le rapprochement israélo-arabe.
Le Roi Mohammed VI a clairement indiqué, à la fois dans des déclarations publiques et lors de conversations avec Mahmoud Abbas, que l’accord de normalisation avec Israël ne signifie pas l’abandon des Palestiniens. Par contre cela signifie que les Palestiniens sont invités à reprendre les négociations, laissant derrière eux le bagage de leurs conditions préalables passées. Les dirigeants israéliens devraient également voir ces percées remarquables comme une opportunité d’apporter de nouvelles idées, s’inspirant du plan américain «Peace to Prosperity» de 2020.
L’accord entre Israël et le Maroc est historique, tout comme les liens familiaux entre les deux pays. Un million d’Israéliens sont soit du Maroc, soit ont eu un parent ou un grand-parent né dans ce pays. Les droits légaux des juifs et des autres minorités religieuses sont garantis dans la constitution marocaine de 2011. Les écoles juives existent toujours dans les grandes villes du Maroc, et les Juifs y étudient librement.
Il y a, bien sûr, une frange de la société marocaine qui rejette cet accord avec Israël, principalement des mouvements islamistes et adeptes de diverses idéologies de gauche. Cependant, des millions de jeunes Marocains en ont assez des idéologies extrémistes et xénophobes et veulent les opportunités et les avantages que seuls la paix et le partenariat peuvent apporter. Ils considèrent Israël comme un partenaire solide pour créer des emplois, accroître les capacités et susciter l’espoir pour leur avenir.
La nouvelle vague d’accords de paix réaligne le monde arabe. Il y a quelques décennies, « de l’océan [Atlantique] au Golfe » était le slogan des nationalistes panarabes pro-soviétiques. Maintenant, ironiquement, le même concept pourrait être utilisé pour décrire le partenariat de forces – de Rabat et Casablanca sur la côte atlantique à Abu Dhabi et Manama sur le Golfe, et avec le Caire, Khartoum, Jérusalem et Amman – qui subissent le radicalisme totalitaire, cette fois dans un costume islamiste, comme une menace commune. Le Maroc, sur le flanc occidental de cette alliance, a une contribution stratégique cruciale à apporter: sa voix respectée de l’islam modéré peut faire une différence dans la lutte idéologique avec les radicaux islamistes en Europe, en Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient.
Le nouvel accord maroco-israélien est doublement significatif pour les Marocains car il s’est également accompagné de la reconnaissance par la Maison Blanche de la souveraineté marocaine sur ses provinces sahariennes. Cette étape importante reflète la conscience américaine que Rabat a engagé cent milliards de dollars d’investissements pour sa population sahraouie – tandis que la milice séparatiste du Polisario, soutenue par l’Algérie et ses camps enclavés restent un centre de misère, de souffrance et de terrorisme.
Grâce aux progrès accomplis, les mois à venir offrent aux pays arabes l’occasion d’aider à remodeler le discours et l’ordre du jour internationaux sur le rapprochement israélo-palestinien.
La nouvelle administration Biden peut aider en adoptant une nouvelle approche du rétablissement de la paix qui tire les leçons de la nouvelle vague de résultats diplomatiques. Le moment est venu de tirer parti de la promesse des nouveaux accords – pour tous leurs signataires, les Palestiniens et la région au sens large. Si la vague de rétablissement de la paix se traduit par des avantages tangibles pour la jeunesse arabe, le soutien panarabe à la paix avec Israël ne fera que croître.
Abraham Lincoln avait déclaré: «La meilleure façon de prédire votre avenir est de le créer». Il incombe ainsi aux Américains, aux Arabes, aux Israéliens et à toutes les parties prenantes d’une région sûre et prospère d’appliquer ce principe pour la paix.
(*) Boaz Bismuth est directeur du premier quotidien israélien «Israel Hayom» (Israël aujourd’hui)
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via Abdo El Rhazi La paix arabo-israélienne s’étend désormais sur la région d’Est en Ouest
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