La manifestation des enseignants contractuels et les dérapages qui s’en sont suivis, ne sont pas aussi étranges qu’on a voulu le faire croire. Le malaise remonte à très loin et il est très profond.
L’origine du problème réside dans le fait que le gouvernement considère l’enseignement comme une charge budgétaire. Il établit le budget d’abord et se demande ce qu’il pourrait faire avec. Voici votre enveloppe, débrouillez-vous!
Par ailleurs, les « dépenses » pour l’enseignement et l’éducation sont comptées avec les dépenses sociales. Et c’est là le plus grand drame.
Si le gouvernement avait posé comme idée de base que l’enseignement et l’éducation étaient le premier et le plus important investissement, il aurait commencé non pas par compter les sous mais par mettre en place une stratégie de développement globale du pays avant de distribuer les fonds.
Une fois qu’on aura compris que le développement du pays dépend de son enseignement et donc de ses enseignants, il ne sera alors plus compliqué de considérer les dépenses de ce secteur comme des galères budgétaires. On sacrifiera tout pour investir dedans.
Pire encore, la privatisation de l’enseignement s’est traduite par le pourrissement de l’école publique, du primaire à l’université. Ici aussi, on soigne ceux qui paient le plus. Les institutions privées sont belles, propres, leur environnement immédiat est bien soigné et protégé par des agents de l’ordre et on autorise les parents à stationner en troisième position sans être inquiétés. Le client es roi, même dans l’enseignement.
Aux antipodes, les établissements publics sont laissés à l’abandon, sales, mal agencés mal gérés et leur environnement immédiat n’invite pas à la connaissance et au savoir. Le Maroc a créé deux espaces d’enseignement différents, et par conséquent deux types de citoyens.
On peut faire un tour du côté des collèges et lycées privés ou ceux des missions pour voir comment ces établissements s’accaparent tous les trottoirs adjacents et comment la circulation s’arrête quand il y a réunion des parents ou un autre événement scolaire. Dans les quartiers populaires, les élèves sortent droit dans des espaces anarchiques sans même des ralentisseurs pour les protéger contre les accidents de la circulation. Ralentisseurs qui sont abondants devant les écoles privées et les missions.
Deux mondes
Nous avons donc, d’un côté, des citoyens bien instruits, polyglottes et bien préparés aux meilleurs fonctions, et de l’autres des citoyens très peu qualifiés ne maîtrisant aucune langue et qui ne pourront aller au delà des métiers les moins rémunérateurs (dont l’enseignement curieusement). Dans cette catégorie, le poids de le religion est plus lourd que dans la première. Si les islamises ont pu glaner plus de voix aux deux élections précédentes, c’est à cause de ce système inégalitaire. Ceux qui s’étonnent aujourd’hui ou bien ils font semblant ou bien ils n’ont rien compris.
Dans un pays qui considère que l’enseignement est l’investissement le plus important de tous, l’enseignant serait le mieux traité de la fonction publique. C’est lui qui traduit la volonté de développement et le savoir qui lui donne sa consistance aux générations montantes.
Quand on le traite comme une charge insupportable en réduisant au maximum son salaire qui va encore être gratté par l’inflation on ne lui laisse aucune chance pour s’améliorer constamment afin de s’adapter aux nouveautés.
Le système se reproduit à l’identique et on peut se demander si cette reproduction est tenable très longtemps.
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via Abdo El Rhazi Enseignants en colère. Le mal est plus profond
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